En cette période de très forte circulation du virus qui sera sans nul doute prochainement aggravée par la diffusion sur notre territoire du très contagieux variant anglais, Jean Castex, accompagné notamment d’Olivier Véran et de Jean-Michel Blanquer, a annoncé jeudi 14 janvier des mesures qui nous apparaissent très insuffisantes au regard des enjeux.
Le couvre-feu avancé à 18h nous semble en effet un outil inadapté pour endiguer l’épidémie à ce stade. En effet, si les couvre-feux de novembre ont participé à juguler la progression des cas Covid-19, ils ont été décidés dans un contexte sanitaire bien différent de celui que nous connaissons aujourd’hui. La situation s’est depuis lors bien dégradée, le variant britannique est, de plus, en circulation sur notre territoire, et cette nouvelle annonce s’inscrit dans une période hivernale marquée par des journées plus courtes et une vie essentiellement en intérieur. Si un tel dispositif diminue certaines interactions sociales vraisemblablement sans masque et/ou distance (rencontres amicales, familiales, etc.), nous craignons que ses effets collatéraux ne contrebalancent négativement les effets bénéfiques attendus.
En effet, un couvre-feu à 18h risque d’entraîner :
- une aggravation des pics de surdensité de population et de risque de contagion, notamment entre 17 et 18h, dans les transports en commun,
- une surpopulation dans les commerces et les supermarchés qui, de leur côté, rencontreront très certainement d’immenses difficultés à faire respecter les jauges.
Le risque de telles mesures est aussi de créer un fort mécontentement auprès des commerçants et des populations vues comme des “machines à produire”, alors que l’on assouplit paradoxalement le télétravail et que la sécurisation des lieux de vie collectifs, que sont les établissements scolaires et les lieux de travail, sont, pour leur part, largement défaillants.
Concernant les établissements scolaires, nous saluons la prise de conscience de l’exécutif, et plus particulièrement du ministre de l’Éducation nationale qui reconnaît désormais en creux que ceux-ci sont l’un des maillons faibles de la lutte contre l’épidémie. La problématique des restaurants scolaires, des salles de restauration de groupe et des sports en lieux clos a enfin été soulevée, et le testing massif des élèves nous semble également un impératif au moment où nous abattons nos dernières cartes afin d’empêcher la fermeture des écoles.
Cependant, hormis l’abandon du sport en salle, nous doutons de l’efficacité des mesures annoncées.
Dans les restaurants scolaires, LA mesure à prendre n’est pas de faire manger une même classe à une même table, mais de faire manger une même classe dans une même salle ! C’est en effet nier le risque aérosol que de raisonner ainsi, risque qui a pourtant mené à la fermeture des restaurants à l’automne. Les élèves d’une table peuvent bien entendu être contaminés par les élèves d’une autre table. La solution réside dans une très grande distanciation et une aération majeure de ces salles (à mesurer par des capteurs de CO2 – solution du FabLab LaFabrique) et surtout une séparation en groupes qui doivent déjeuner en petits effectifs, de façon décalée ou dans des salles séparées, ce qui semble tout à fait impossible, en l’état des annonces et notamment en l’absence de renfort de personnel. Nous craignons donc que cette mesure ne soit non pas une demi-mesure, mais plutôt une “non-mesure” puisque les établissements scolaires regroupent déjà les élèves par classe depuis le dernier renforcement du protocole de l’Éducation nationale.
Enfin, il a été présenté la mise en place d’un testing de masse de l’ensemble des élèves, l’objectif étant de réaliser 300 000 tests par semaine. Si cette mesure de tests massifs (mais un million d’élèves – objectif mensuel – ne représente somme toute que 8% d’entre eux) nous apparaît essentielle pour garder l’École ouverte dans un contexte d’intense circulation virale, nous craignons ici une demi-mesure. Nous courrons après le temps et l’objectif de 300 000 tests hebdomadaires, s’il est atteint, le sera trop tard. Et qui réalisera ces tests ? Les prélèvements nasopharyngés requièrent des personnels formés à ce geste. Est-ce prévu ? Nous l’espérons.
Mais surtout, combien d’élèves seront réellement testés ? Les tests nasopharyngés sont en effet désagréables et représentent un geste invasif qui requiert le consentement des parents. Nombreux sont déjà ceux qui refusent d’imposer un tel acte à leur enfant dans un cadre purement préventif. Par exemple, lors d’une campagne de tests réalisés dans quelques lycées d’Île-de-France, moins de 20% des élèves de cet échantillon ont été testés. Il est facile d’imaginer que des plus jeunes, en écoles élémentaires et maternelles, le seront encore moins.
C’est pourquoi, pour pallier ce double problème d’acceptabilité et de disponibilité d’un personnel formé pour pratiquer ces tests pourtant nécessaires, nous pensons urgent de privilégier un dépistage par prélèvement salivaire, comme proposé par EasyCov – pour en améliorer le confort, l’acceptabilité et donc l’intérêt : faire des tests itératifs proactifs pour isoler plus tôt les cas positifs et contagieux.
Mais surtout, dans un contexte où le variant anglais est très contagieux parmi les plus jeunes, les règles de fermeture d’une classe ou d’un établissement doivent impérativement être corrigées. La définition d’un cas contact doit répondre à des critères scientifiques objectifs, et non pas à des règles déterminées arbitrairement par le ministère de l’Éducation nationale. Il en est de même concernant les mesures d’accompagnement des élèves touchés (positifs ou contacts), leurs enseignants et leurs familles, afin que soient mises en place de réelles mesures d’isolement. En résumé, un cas positif, une classe fermée, une classe testée, à l’instar de nombre de protocoles adoptés par nos voisins européens.
Nous rappelons pour conclure que l’amélioration de la qualité de l’air en classe est un sujet encore laissé en suspens, et qu’elle ne peut être rendue possible que par :
- des effectifs plus restreints dans les classes ;
- un meilleur protocole d’aération, qui doit une fois encore, répondre à des critères scientifiques et non à ceux du ministère.
Comme ce qui s’applique en milieu scolaire clos, est transposable au milieu professionnel et aux lieux de restauration, nous demandons aussi de nouveau la prise en considération du risque aérosol et de réels protocole d’aération renforcée dans tous les lieux clos.
Seule une gestion proactive peut en effet enrayer la diffusion du virus partout et pour tous, et pour cela il faut :
- Préserver la santé des salariés pour préserver l’économie, l’entreprise et le système de santé ;
- Renforcer le télétravail ;
- Protéger les plus fragiles et les personnes à risque de forme grave aussi au sein des entreprises ;
- Adapter les lieux de convivialité et de repas au travail comme à l’école ;
- Gérer l’aération de façon objective, notamment en open-space, en contrôlant les taux de CO2 par des capteurs, et en augmentant les flux des VMC si elles existent
- Permettre aux entreprises de déduire leurs dépenses engagées au titre de la sécurité sanitaire: SHA, masques, VMC, purificateur d’air, tests salivaires EasyCoV, etc.
Agissons maintenant pour enrayer la diffusion du virus et ne pas être de nouveau réduit à gérer la catastrophe par des mesures de restrictions radicales. Le confinement généralisé est ce qui reste lorsqu’il ne reste plus rien, lorsque les mesures de prévention – faute d’avoir été suffisamment volontaristes et courageuses – ont échoué et que le système est débordé.
Personne n’en veut, nous n’en voulons pas, alors anticipons !
Pour aller plus loin:
Aération document de référence : https://ducotedelascience.com/wp-content/uploads/2020/10/QUALITE_AIR_COVID19_LIEUXCLOS_VL-1-1.pdf
Comment sécuriser les lieux clos avec un capteur CO2 : https://ducotedelascience.com/releves-de-co2-en-lieu-clos-pourquoi-comment/
Le FabLab de SupElec – développeur de différents types de capteur CO2 : http://lafabrique.centralesupelec.fr/projetco2/
EasyCoV – une solution pertinente pour des tests itératifs salivaires : https://ducotedelascience.com/test-salivaire-easycov-quand-lanalyse-de-la-has-est-h-s-hors-sujet/